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L’angoisse de séparation : un éclairage neuroscientifique à l’occasion de la Semaine du Cerveau

  • Photo du rédacteur: Charlotte Sancho
    Charlotte Sancho
  • 16 mars
  • 4 min de lecture

L’angoisse de séparation est une expérience universelle qui traverse le développement humain, depuis l’enfance jusqu’à l’âge adulte. Elle se manifeste par une détresse marquée lors de la séparation d’une figure d’attachement et peut, dans certains cas, devenir pathologique. À l’occasion de la Semaine du Cerveau, il est essentiel d’examiner ce phénomène à la lumière des neurosciences, en mettant en évidence les mécanismes cérébraux et psychologiques qui le sous-tendent.


Dans cet article, nous explorerons les bases neurobiologiques de l’angoisse de séparation, ses manifestations à différents âges et les stratégies thérapeutiques issues des thérapies cognitives et comportementales (TCC) pour mieux la gérer.



1. Bases neurobiologiques de l’angoisse de séparation


1.1. Le rôle du système limbique


L’angoisse de séparation repose sur des circuits cérébraux complexes, impliquant principalement le système limbique, qui régule les émotions et les réponses au stress. Deux structures jouent un rôle clé :


L’amygdale : responsable de la détection des menaces et de la réaction émotionnelle associée à la séparation. Son hyperactivation chez les personnes anxieuses amplifie la détresse en réponse à l’éloignement d’une figure d’attachement.


L’hippocampe : impliqué dans la mémoire et l’apprentissage, il participe à l’association entre séparation et expérience de détresse.


Les études en neuroimagerie montrent que chez les enfants et les adultes souffrant d’un trouble d’anxiété de séparation, l’amygdale est hyperactive, tandis que les régions frontales, impliquées dans la régulation émotionnelle, sont moins sollicitées (Guyer et al., 2013).


1.2. Les neurotransmetteurs impliqués


Plusieurs neurotransmetteurs jouent un rôle clé dans la modulation de l’anxiété liée à la séparation :


L’ocytocine : connue comme l’« hormone de l’attachement », elle est libérée lors des interactions sociales et contribue à l’apaisement des angoisses.


Le cortisol : hormone du stress, dont la libération excessive en cas de séparation prolongée peut perturber le développement émotionnel.


La sérotonine et la dopamine : régulent les réponses émotionnelles et influencent la capacité à gérer la séparation. Une altération de ces systèmes est souvent observée dans les troubles anxieux.



2. Manifestations de l’angoisse de séparation à différents âges


2.1. Chez l’enfant : un processus développemental normal


L’angoisse de séparation apparaît typiquement autour de 8 mois et atteint un pic vers 18 mois, lorsque l’enfant prend conscience de la permanence de l’objet et de l’éloignement possible des figures d’attachement. Elle s’atténue progressivement grâce au développement des compétences d’autorégulation émotionnelle et à l’établissement d’une sécurité affective.


Cependant, chez certains enfants, cette anxiété peut persister et évoluer vers un trouble d’anxiété de séparation (TAS), caractérisé par une peur excessive et persistante de la séparation, pouvant entraîner des refus scolaires, des troubles du sommeil et une détresse importante (APA, DSM-5, 2013).


2.2. À l’adolescence et à l’âge adulte : une anxiété masquée


Contrairement aux idées reçues, l’angoisse de séparation ne disparaît pas toujours à l’âge adulte. Elle peut se manifester sous différentes formes :


Une dépendance affective excessive dans les relations amoureuses et amicales.


Une peur du rejet ou de l’abandon, entraînant des comportements d’hypervigilance ou de recherche excessive de réassurance.


Un évitement des situations de séparation, pouvant aller jusqu’à des troubles paniques ou une anxiété généralisée.


Les recherches en neurosciences suggèrent que ces manifestations sont liées à une réactivité accrue du système de l’attachement et à une moindre régulation par le cortex préfrontal, qui modère habituellement les réponses émotionnelles automatiques (Fonagy et al., 2018).



3. Approches thérapeutiques et pistes de prise en charge


3.1. Thérapie cognitive et comportementale (TCC)


Les TCC sont particulièrement efficaces pour traiter l’anxiété de séparation. Elles visent à :


Modifier les pensées anxieuses associées à la séparation (« Si je suis seul(e), quelque chose de grave va arriver »).


Exposer progressivement la personne à des situations de séparation, pour réduire l’hyperactivation de l’amygdale et favoriser un apprentissage sécurisant.


Développer des stratégies d’autorégulation, comme la respiration diaphragmatique ou la restructuration cognitive.


Une étude de Pina et al. (2009) a montré que les enfants traités par TCC présentaient une diminution significative des symptômes du TAS après 12 semaines de thérapie.


3.2. Approche basée sur l’ocytocine et l’attachement sécurisé


Les recherches actuelles explorent l’utilisation de l’ocytocine en complément des thérapies traditionnelles pour favoriser la régulation des émotions. De plus, le renforcement de l’attachement sécurisé par des interactions positives avec les figures de référence (parents, partenaires, thérapeutes) peut aider à moduler la réponse cérébrale à la séparation.


3.3. Techniques de pleine conscience et d’auto-compassion


Les approches basées sur la pleine conscience et l’auto-compassion permettent de mieux tolérer l’inconfort émotionnel lié à la séparation. Elles agissent sur le réseau de régulation du stress et favorisent une perception plus apaisée de la solitude.



Conclusion


L’angoisse de séparation est une expérience profondément ancrée dans notre neurobiologie et joue un rôle essentiel dans notre développement émotionnel. Si elle est normale dans l’enfance, elle peut parfois persister à l’âge adulte et générer des formes d’anxiété invalidantes.


Grâce aux avancées en neurosciences, nous comprenons mieux les circuits cérébraux impliqués et pouvons proposer des approches thérapeutiques adaptées. La Semaine du Cerveau est l’occasion de rappeler que la santé mentale repose en grande partie sur la qualité de nos attachements et notre capacité à gérer les séparations.


💡 Et vous, comment vivez-vous les séparations ? Cette angoisse a-t-elle déjà impacté votre quotidien ?


📚 Références :


• American Psychiatric Association. (2013). Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders (DSM-5).


• Fonagy, P., et al. (2018). Attachment Theory and Mentalization.


• Guyer, A. E., et al. (2013). Neural correlates of vulnerability to anxiety in adolescence.


• Pina, A. A., et al. (2009). Effects of cognitive behavioral therapy on separation anxiety disorder in youth: A randomized controlled trial.


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